Résistances 6. Rosa 1975

Résister par l'imagination.

Émerveillement et mélancolie d'un temps pas si lointain où tout était possible. Une
utopie en marche ici et maintenant pour changer le monde et remplir sa
vie, un engagement total, politique et familial, combatif et joyeux, aux
antipodes de la société de consommation… Cette recherche, qui se
régénère régulièrement en ZAD et autres communautés autonomes, François
Godard l'a vécu enfant : fils de compagnons d'Emmaüs, tout son
imaginaire est nourri de ce qui était simultanément un projet
révolutionnaire et une réalité quotidienne. Traversée
par tous les rêves de sa génération, Rosa découvre en 1973, par hasard,
le mouvement Emmaüs. Elle y trouve ce qu'elle cherchait, et sa vie
entière s'engouffre dans la réalisation concrète de cette utopie : petit
monde en marge du grand, la communauté Emmaüs rassemble sans
distinction des gens de tous horizons, qui tirent une invraisemblable
richesse du partage de leur pauvreté. La misère n'y est plus une
déchéance, elle devient un combat, mené par les premiers concernés, dans
l'idée révolutionnaire que « c'est à nous de bâtir le monde que nous
voulons ». Mais les dérives existent, là comme ailleurs... Comment
réinventer sans cesse l'utopie, comment naviguer entre bonnes intentions
et grandes illusions pour résister à la normalisation ? Que reste-til,
l'âge venu, d'une vie entière de combats contre le désenchantement du
monde ? Rosa 1975 renouvelle une fois encore l'expérience Résistances !
C'est à l'arrivée du « nouveau » sur scène que l'on prend la mesure du
tourbillon de musique, de mots et d'images qui va déferler le temps du
spectacle. Des trognes, des caractères, des solitudes et des veillées,
les compagnons d'Emmaüs sont là, avec les camions, les ateliers et les
chansons. La circulation du récit entre Godard l'auteur, François le
petit garçon et une Rosa à peine imaginaire forme un espace poétique
sensible et délicat qui accueille les idéaux, les enthousiasmes et les
défaites, et témoigne avec amour et colère de leurs dérives des trente
dernières années.